mercredi 22 avril 2009

Peut-on obliger le gouvernement à répondre dans un certain délai?

Les commissions permanentes de la chambre des députés ont adressé au gouvernement des questions écrites à propos du projet de loi relatif au code des ports maritimes le 30/12/2008. Depuis ce jour on attend les réponses écrites.

A deux reprises, la chambre procède à un rappel adressé au ministre des transports avec un intervalle de 1 mois. Cette technique de rappel été appliquée depuis des lustres par la chambre mais son application n'est pas systématique.

A vrai dire, la question n'est pas aussi simple qu'on le pense. D'abord, le rappel ainsi que l'envoi des questions devrait être adressé au gouvernement, représenté par le ministère des communications et des relations avec la chambre des députés et la chambre des conseillers. Mais on continue avec une pratique ancienne qui n'est pas tout à fait cohérente avec le sens des textes. Quel intérêt de créer ce ministère s'il ne joue pas son rôle catalyseur de ces rapports constitutionnels entre parlement et gouvernement. Normalement, tout devrai passer par lui.

Ensuite, l'envoi des questions écrites par les commissions au ministère concerné du projet n'est pas tout à fait évident. En effet, le 1er paragraphe de l'article 28 de la constitution précise que la chambre des députés et la chambre des conseillers exercent le pouvoir législatif conformément à la constitution. Adresser des questions au gouvernement par le parlement est une action constitutionnelle qui doit être fondée et justifiée par des textes constitutionnels.

Les articles 28 et 33 de la constitution évoquent la question d'amendement sans pour autant définir les modalités par lesquelles le parlement procède à ces amendements! Les questions écrites sont elles un de ces procédés ou le seul procédé?

De même, l'article 61 précise que chaque député peut adresser au gouvernement des questions écrites ou orales. Le texte ne précise pas, non plus, la teneur de ces questions! Un député peut-il adresser une question écrite proposant un amendement?

Le 3ème paragraphe de l'article 61 traite des questions orales dans le cadre de sessions périodiques qui lui sont consacrées exclusivement et des questions orales à propos des sujets d'actualité.

L'article 73 de la constitution évoque aussi le cas de la saisine obligatoire du Conseil Constitutionnel pour les projets de lois modifiés quant au fond par la chambre des députés[1].

Donc, la question n'est pas clairement précisée dans la constitution d'où plusieurs questions:

1- le député peut adresser des questions, mais de quelle nature?

2- La commission n'est pas expressément autorisée à adresser des questions? Peut-elle le faire quand même? Et selon quel fondement?

La loi organique 48-2004 ne résout pas le problème. Mutisme. Il nous reste alors, le règlement intérieur des 2 chambres pour chercher à dénicher le fondement de cette pratique.

L'article 10 du R.I de la Chambre des députés précise que les députés adressent, sous forme écrite, leurs observations, amendements[2] et questions à propos des projets de lois qui lui sont transmis au président de la chambre qui les transmet aux commissions saisies des projets en question.

L'article 11 précise aussi que chaque député peut adresser, à travers le président de la chambre, des questions écrites au gouvernement qui sera tenu d'y répondre dans un délai ne dépassant pas 1 mois. Le député peut aussi adresser une question orale après avoir informé le président de sa teneur. Le gouvernement y répondra dans un délai ne dépassant pas un mois.

Le même article précise que la question orale ne devrait pas avoir un caractère personnel, locale, ou consultatif.

Ainsi, l'article 10 traite des questions adressées par les députés (et non par les commissions) autour des projets de lois. L'article 11 traite des autres questions que peuvent adresser les députés. Dans ces 2 dispositions, il n'est pas fait allusion aux commissions.

En outre, on note le délai imparti au gouvernement pour répondre qui est fixé à un mois.

L'article 44 dispose que les commissions statuent sur les amendements[3] qui lui sont présentés et décident si elles les acceptent ou non. Tout député peut assister à leurs réunions et présenter son point de vue à propos du projet ou de son amendement.

L'article 45 dispose en outre que les dispositifs des rapports des commissions à propos des projets de lois doivent suggérer à l'assemblée plénière leur adoption, leur apporter des amendements ou les rejeter.

Si on fait le rapprochement entre les articles 10, 44 et 45 on peut dire, sans la moindre hésitation, que le seul organe habilité à amender un projet de loi est la séance plénière. Ce qui nous conforte encore plus dans nos convictions la simple lecture de l'article 52 du même règlement qui précise qu'ont droit à proposer des amendements: les députés et les membres du gouvernement et ce en cours de l'assemblée plénière.

En résumé, aucun texte n'autorise les commissions à adresser des questions au gouvernement. Aucun texte, non plus, n'autorise la chambre à assigner à ce même gouvernement un délai pour répondre aux questions des commissions.

Il s'avère que la pratique actuelle de notre procédure d'amendement ( que ce soit de la chambre des députés ou de la chambre des conseillers) est complètement à coté des textes de la constitution et du règlement intérieur.

[1] - à noter que le texte ne cite pas la chambre des conseillers en tant qu'autorité pouvant amender des textes même si ce pouvoir lui est explicitement reconnu par l'article 33!!!

[2] - à lire "propositions d'amendements" car c'est la formulation qui devrait être utilisée.

[3] - à lire proposition d'amendement (que nous pensons plus adéquat).

mercredi 8 avril 2009

On commence à penser écolo !!!

Deux projets de lois cours d'examen par les commissions permanentes se rapportent à des questions écologiques et biologiques. L'un est relatif aux zones maritimes et littorales protégés, l'autre se rapporte au régime de "repos biologique" dans le secteur de la pêche et son financement.

Les deux projets ont un chevauchement manifeste du point de vue des matières réglementées et sont proposés par deux ministères différents: L'un par l'environnement, l'autre par l'agriculture. On sent déjà à travers leurs articles, un risque de chevauchement ou conflit de compétence qui pourrait surgir surtout en matière d'interdiction d'activités de pêche.

Le projet des zones protégées va affecter le régime de propriété immobilière en limitant ou altérant l'exercice des droits réels des propriétaires. Dans ce cadre, on note l'absence de référence aux dispositions du code des droits réels, droit commun de la propriété réelle immobilière.

Ainsi, la défragmentation des textes n'a pas été accompagnée par des mesures législatives adéquates en vue d'assurer l'harmonisation des textes et l'assurance de renvois visibles entre textes concernés.

On ne va pas évoquer, une autre fois, une rédaction législative qui laisse à désirer par l'effet de cette traduction français arabe presque automatique.

Quant au deuxième projet, de par sa composition (un article modifiant la loi n° 13 du 31/1/1994 relative à l'exercice de la pêche; 2 articles instituant une redevance; un article prévoyant une sanction prévue à l'article 36 de la loi n° 13 susvisée et un article abrogeant l'article 7 de la dite loi), il alerte sur la structure de la loi.

En effet, on se demande si cette structure est conforme à ce que doit être une structure de la loi!!!

Il est certain que la rédaction de nos lois n'obéit plus à la logique de la rédaction normative des textes. Parfois, c'est du charabia du point de vue technique.