vendredi 9 septembre 2011

Devrait-on avoir peur de la future Assemblée Constituante ?

Devrait-on avoir peur de la future Assemblée Constituante ?
Si polémique a eu lieu ces derniers jours à propos du referendum à propos des attributions de la future Assemblée Constituante, c’est que, indépendamment des alibis des uns et des autres, une bonne majorité des intervenants ignorent les épineuses difficultés auxquelles cette Assemblée va devoir faire face et qui vont l’empêcher d’exercer pleinement et souverainement les pouvoirs que certains craignent .
Cette Assemblée aura une année pour établir une nouvelle Constitution. La durée de ce mandat est explicitement fixée par l’article 6 du décret 1086 du 3 Aout 2011. Pourra-t-elle le faire ? Certainement, Oui ; mais à condition qu’elle s’y mette exclusivement.
Mais, si elle va chercher à désigner un exécutif , le respect de son mandat serait, presque , impossible et ce pour des raisons juridiques et pratiques.
Sur le plan juridique, d’abord, cette Assemblée va faire face d’épineux problème : vide juridique et des textes lacunaires. Sur le plan matériel, ensuite, pour assumer effectivement sa mission, l’Assemblée va être appelée à régler tant des questions d’organisations qui vont certainement prendre plus du temps.
Certains croient que l’Assemblée pourra désigner un exécutif quelques jours après son élection et que l’actuel gouvernement partira dès l’élection de la Constituante. Faux.
Cette Assemblée ne pourra se réunir qu’après que le Comite Central de L’Instance Supérieure Indépendante pour les Elections aurait publié les résultats définitifs du scrutin. Cette publication interviendra après que le Tribunal Administratif aurait statué définitivement sur les recours éventuels. Ces différentes procédures dureront au moins une quinzaine de jours.
A partir de cette publication, le vide juridique des textes ou leurs lacunes vont éventuellement perturber la tenue de la première séance dans les meilleurs délais. On peut évoquer à ce propos la première question : Qui va convoquer cette Assemblée ? Ni les décrets-lois ni les décrets élaborés par l’actuel exécutif transitoire n’ont prévu un tel détail. Un jeu de hasard commence.
Les textes auraient précisé, d’abord, l’autorité habilitée à convoquer la dite Assemblée, et, ensuite, établir un lien entre l’ISIE et l’Assemblée pour déterminer la liste définitive des élus et leurs adresses.
Fallait-il attribuer cette tache, dès maintenant, à l’ISIE par un décret pour éviter de tels problèmes.
N’oublions pas que l’Assemblée va devoir faire face dès sa première réunion à un autre vide juridique : l’absence d’un règlement interne par l’effet de l’abrogation de celui qui été en vigueur avant la suspension de la constitution. Durant cette première réunion, on va encore improviser sur plusieurs questions : qui présidera la séance inaugurale ? Comment répartir les élus dans la sale plénière ? Quelles commissions vont devoir élire ?
Toutes ces questions vont certainement trouver des solutions à travers les transactions entre les élus. Qui dit transaction et négociation en matière politique, dit Temps.
Une simple prévision du temps que ca va nécessiter la mise en place de la nouvelle Assemblée ne pourra situer la durée d’une telle période inférieure à 2 ou 3 semaines. Déjà, on est à un mois perdu.
En décembre, l’Assemblée pourra avoir sur le dos le chantier de la loi des finances. Si elle va s’y immiscer, on est parti encore pour un autre mois.
Ensuite, si la chambre veut désigner un nouveau président de la république et un nouveau gouvernement, elle doit obligatoirement présenter un nouveau texte qui remplacera le décret-loi n° 14 du 23 Mars 2011 dont son article 18 précise que le dit décret-loi sera sans effet à partir du moment où la nouvelle Assemblée présentera un autre cadre de l’organisation des pouvoirs.
Or, la rédaction d’un nouveau texte n’est pas une opération aisée qu’on pourra réaliser durant quelques jours. On se demande alors si elle ne choisira pas la voie la plus facile en adoptant les termes du dit décret-loi. Encore une fois, elle va falloir le modifier et l’adapter à la nouvelle donne.
Et avant qu’elle le face, elle sera appelée à décider de la nature de ses actes et décisions. Ainsi, il est attendu qu’elle prenne la première mesure constitutionnelle en précisant son habilité à élaborer des lois hiérarchiquement supérieur aux décrets lois.
Et si on y ajoute qu’elle sera tenue de décider des institutions dissoutes (Chambre des Conseillers, Conseil Constitutionnel, CES..) il serait utopique de penser que la Nouvelle ANC pourra gérer tout ce chantier durant une année.
L’Assemblée Nationale Constituante a été créée pour doter la Tunisie d’une nouvelle Constitution. Elle aura quelques mois pour le faire. Ses membres verront que la tache est énorme et qu’ils devront s’y consacrer exclusivement.
La crainte d’une confusion de pouvoirs, même si elle est théoriquement compréhensible, n’est plus justifiée au vu des différentes difficultés au quelle la Constituante fera face.

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