mercredi 25 janvier 2012

La bipolarisation : Quel impact sur les travaux de l’Assemblée Nationale Constituante ?

Alors qu’on s’attendait après le 14 janvier à voir émerger un débat autour des principes généraux qui devraient gouverner /ou assurer le bon fonctionnement d’un Etat moderne, démocratique et cohérent après que tout le monde ait reconnu que Ben Ali et ses adeptes ont dénaturé tout le système spécialement dans ses secteurs clés : éducation, santé, magistrature et finances, on s’est trouvé face à un débat étrange et suspect autour de l’identité, la religion et la nature laïque ou non de la société ou de l’Etat.

Initialement, le débat a été provoqué par une tranche des mass-médias et vite relayé par les réseaux sociaux, suite à des évènements qui restent encore d’origine énigmatique.

Après qu’une dizaine d’individus qualifiés de « Salafistes » ont défrayé la chronique il y a quelques mois par l’attaque portée contre la salle du Cinéma Africa, on voit le nombre de ces individus bizarrement multiplié à travers tout le pays forçant la société à parler d’un mouvement « salafiste » qui devient aujourd’hui (encore !!!) le centre d’un débat à propos de plusieurs cas : Sejnane, Mannouba, Fac de Sousse, Mosquée de Mahdia et récemment l’affaire Nessma.

Comment se fait-il que malgré l’indignation exprimée par (presque) tout le monde, un « mouvement » gagne en popularité si on tient au nombre des personnes présents dans ces différentes situations de conflit ?

Les spécialistes de la Sociologie politique devraient s’attarder sur ce cas bizarre car il n’est nullement écrit en aucun manuel de cette matière qui traite des partis politiques et du cadre partisan qu’un parti politique gagne en popularité quand il est source d’indignation populaire !!

Aujourd’hui, journaux écrits, émissions radio ou Tv, réseaux sociaux ne parlent que de cette question.

Le débat est encore aggravé et relancé par cette intervention de l’élu Chourou qui alimente aujourd’hui polémique et contestation.

Voilà ! la polémique gagne aujourd’hui la plénière de l’Assemblée Nationale Constituante appelée dans les prochaines semaines à entamer sa mission principale : la rédaction de la Constitution.

Le « timing » de cette polémique pousse encore une fois à se poser des questions.

La polémique à propos de la laïcité installée avant les élections a dévié l’attention du public sur les instructions en cours touchant des questions de haute importance comme la corruption, les évènements allant du 17/12/2010 au 14/01/2011 et l’argent volé au peuple et à la Tunisie.

Grace à ce débat étrange à la révolution tunisienne, on a oublié de suivre ces dossiers et on se rend compte aujourd’hui que rien (ou presque) n’a été fait. Hélas.

Grace à ce débat, personne ne s’est intéressé à la Campagne électorale et on se rend compte aujourd’hui qu’aucun parti n’avait réellement un programme d’une Constituante comme personne ne s’est rendu compte de la campagne latente menée par certains partis ou personnes et qui a permis une certaine représentativité partisane insensée au sein de l’ANC.

Aujourd’hui même, ce débat est relancé mais il commence à gagner l’hémicycle.

DANGER.

La Constitution est avant tout un ensemble de principes généraux affirmant des libertés, des devoirs, des droits sacrés et fondamentaux ; c’est aussi un ensemble d’outils et mécanismes assurant l’équilibre de pouvoir et empêchant tout despotisme ou dictature. C’est aussi un cadre pour valoriser des institutions de différente nature.

En réalité, la rédaction de la Constitution devrait être l’occasion pour le débat qui aurait dû être lancé juste après la révolution.

Une nouvelle Constitution pour une Nouvelle Tunisie. L’ancienne avait comme article 1er : « La Tunisie est un Etat libre, indépendant et souverain ; sa religion est l’Islam, sa langue l’arabe et son régime la République ».

Si on tient aux déclarations des uns et des autres, une bonne majorité des élus tiennent à conserver cet article ou, au moins, sa philosophie.

Mais comme étant un article qui traite de l’identité, le débat autour de la religion pourrait encore une fois relancer la même polémique et on se trouvera dans un « mystère » similaire : « polémiquer sur l’auxiliaire, le principal on s’en fou ».

D’où le risque que l’ANC s’éternise dans l’article 1er pour se trouver par la suite dans la contrainte du temps l’obligeant à « devoir » finir rapidement.

Mais dans ce cas, le prix sera trop cher. Les principes fondamentaux, les droits, les devoirs, les outils et mécanismes, les institutions…tout ceci risque d’être bâclé.

Dans ce cas, la révolution aura échoué….et à jamais.



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