lundi 11 novembre 2013

Lecture dans l’arrêt du Tribunal Administratif annulant la liste des 36 candidats à l’ISIE

Depuis vendredi 8 novembre j’ai entendu toutes les critiques à l’encontre du TA. Il faut avouer que tout le monde en a ras-le-bol de cette série interminable de la mise en place de l’ISIE.
Après son arrêt du 7 nov 2013 et avant même de voir les motifs de son arrêt, certains ont carrément accusé le TA de politiser l’affaire, de freiner le processus électoral et, moi-même, je commençais à se poser des questions sur les intentions de cette instance.
Aujourd’hui, lisant l’arrêt du TA, je me rends compte que le TA a annulé les opérations du tri sur la base d’un seul grief et il n’avait pas tort.
Analysant de près cet arrêt :

Les griefs :

La plaignante a été une 1ère fois sélectionnée dans la liste des 108 candidats, mais éliminée par la suite et écartée de la liste des 36 à 2 reprises.
Elle a attaqué l’arrêté du Président de la commission du tri (Président de l’ANC) fixant les 36 candidats en lui reprochant les griefs suivants :
1-      Violation des conventions internationales et des principes des droits de l’homme, de la loi et la dénaturation des procédures :
Dans ce grief, la plaignante a considéré le TA compétent pour juger de la Constitutionnalité des lois en l’absence d’une Cour Constitutionnelle. Elle considérait l’amendement de la loi 2012-23 comme une atteinte aux droits de la défense, au principe de l’égalité et les principes du procès équitable.
Elle considérait que l’amendement de la loi susvisée était une « validation législative » contraire aux principes généraux et aux textes des conventions internationales.
Elle estimait aussi que l’amendement a violé les principes énoncés dans la loi 1993-64 sur la publication des lois et leur entrée en vigueur.
2-      La violation de l’art 6 de la loi 2012-23 :
Elle estimait que la commission a violé l’art 6 de la dite loi en choisissant les 36 candidats par un vote sans tenir compte de la classification produite par l’échelle d’évaluation.
3-      La violation de l’art 7 de la loi 2012-23 :
Elle estimait que la liste des 36 comportait des noms de candidats ne remplissant pas les conditions prévues à l’art 7 de la dite loi. Elle a cité à titre d’exemple un candidat ne remplissant pas la condition d’expérience ; une candidate faisant partie du RCD, un candidat choisi en violation du principe de l’égalité (juge de la Cour des comptes) et un candidat n’ayant pas démissionné avant qu’il postule.

Les réponses de l’ANC :

Je ne vais pas s’y attarder car ca ne mérite même pas. No comment.

Les motifs du TA

1-      Pour le 1er grief :
Lisant de près le motif du TA, il est bien précisé que « si le juge administratif est tenu de veiller à la bonne application de la loi, il doit, en l’absence d’un juge constitutionnel, vérifier la conformité de la norme à la norme qui lui est supérieure » d’où la légitimité de vérifier la conformité de la loi à la Constitution. Une analyse Kelsenienne assez robuste et que je respecte. 
Le TA a finalement rejeté ce grief.        
Mais il a « glissé » 2 idées :
D’abord, implicitement, la Constitution de 1959 peut être considérée comme encore en vigueur. Je l’ai déjà mentionné dans le dernier post étant donné que la Loi Constituante du 6/12/2011 ne l’a pas expressément abrogé. Le débat est encore ouvert.
Ensuite, il a clairement annoncé qu’en l’absence d’une Cour Constitutionnelle, il a le devoir de juger la constitutionalité des lois en cas de recours devant lui par voie d’exception. Néanmoins, il a bien précisé que son contrôle de la Constitutionnalité sera sous forme de contrôle de conformité. Une nuance à prendre en considération.
2-      Pour le grief de la violation de la validation législative aux conventions internationales :
Le TA a rejeté ce grief
3-      Pour le grief de la violation de l’art 6 de la loi 2012-23 :
Ici, le TA a bien raisonné en imposant à la commission de respecter le classement produit par l’échelle d’évaluation et de procéder ensuite par un vote qui ne devra pas dénaturer ce classement de manière arbitraire.
Ainsi, choisir le dernier candidat par un vote sans justifier l’abandon des autres candidats qui ont un meilleur classement serait un acte arbitraire et abusif.
Ce Grief a été retenu, le seul.
4-      Pour le grief de la violation de la loi 1993-64 :
Le TA a rejeté ce grief
5-      Pour le grief de la violation de l’art 7 de la loi 2012-23 :
Ce grief a été rejeté à l’exception de sa partie concernant la Candidate avocate RCD.

En Résumé :

Ø  Le TA n’a pas réellement rendu un arrêt « politisé ». (du moins en lisant le texte).
Ø  Le TA n’a réellement retenu qu’un seul grief (et un autre très partiellement).
Ø  Encore une fois, l’erreur a été commise par la commission du tri. C’est elle la responsable, cette fois, de ce maux. Passer du 1er candidat au dernier sans la moindre justification, est une manœuvre qui nous fait rappeler les dires du Feu Med Brahmi : « cette élection des membres de l’ISIE est devenue un départage partisan des membres ».
Ø  Ayant tout cet arsenal des arrêts du TA entre les mains, la commission du tri n’aura plus droit à la faute. La solution est claire : faire son travail en toute transparence.

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