mercredi 9 novembre 2016

La Commission des finances rejette la taxe inconstitutionnelle sur les piscines

Quoi qu’on dise, cette ARP (Assemblée des Représentants du Peuple) fait parfois des prouesses et se hisse au niveau des parlements des pays de tradition démocratique, voir même plus.
La commission des finances vient de rejeter, aujourd’hui même, une disposition du projet de lois des finances 2017 imposant une taxe de 1000 dinars à tout propriétaire d’une piscine.
Comme une commission qui se respecte, le motif d’inconstitutionnalité n’a pas été évoqué. C’est au pouvoir compétent d’en statuer, le cas échéant.
L’article 30 du projet de loi de finances 2017 prévoyait une taxe de 1000 dinars imposable à toute personne physique disposant d’une piscine.
Dans le système fiscal tunisien, avant cette loi, la « piscine » est un des paramètres de richesse retenu, à juste titre, pour évaluer le niveau de richesse des uns et des autres. Et c’est juste et vrai. Car dans les années 70, 80 ou même 90, qui pourrait avoir une piscine privée ? Leurs coûts étaient excessifs, non seulement en terme de construction, mais aussi en terme d’entretien.
Mais depuis quelques temps, la « piscine » s’est industrialisée et on pourrait avoir, chez soi, des piscines de différentes dimensions à faible ou moyen budget.
Plusieurs tunisiens, de classes moyennes, qui ont eu la chance d’accéder à la propriété privée, ont voulu réaliser ce rêve d’avoir une « pseudo » piscine privée ne dépassant pas 3-4 mètres et dont le coût ne dépasse pas 4-5 milles dinars.
L’article 10 de la Constitution Tunisienne dispose que l’impôt est un devoir, mais il l’est selon un système juste et équitable.


Mais que fait cet article 30 du projet de lois des finances 2017 ?

Tous les propriétaires des piscines privées seront traités sur le même pied d’égalité.
Un fonctionnaire disposant d’une piscine de 4m à Jrissa (gouvernorat de Kef) sera traité comme un milliardaire disposant d’une piscine olympique à Hammamet. !!!
Les 2 sont riches et ne doivent à l’Etat que 1000 dinars.
Quelle justice et quelle équité dans ce système ?
Pire encore,
Si je suis homme d’affaire riche, j’apporterais ma demeure où y a une piscine, en nature dans le capital de mon entreprise. Du coup, la piscine n’appartient plus à la personne physique, mais à la personne morale, ce qui lui fait écarter du champ d’application de l’article 30.
Pire encore, on a oublié de définir le terme. Je suis un agriculteur qui érige une « jabia » pour l’irrigation. Mes enfants s’y plongent pour se baigner. Moi j’y vois une « jabia », le fisc pourra la considérer comme une piscine.
Enfin, et pas la dernière, qu’en est-il des piscines des résidences à multi propriétaires ?
Bref, la morale de l’histoire : nos compétences du ministère des finances doivent trouver les meilleurs solutions, non pour renflouer les caisses de l’Etat avec du bricolage hasardeux, mais pour bâtir une meilleur fiscalité publique.
Faut-il maintenant s’intéresser à cette histoire d’autoriser les étranger à accéder à nos terres, car si elle se situe au même rang de vouloir renflouer la caisse de l’Etat, elle est plus dangereuse puisqu’elle flirte avec des opérations de blanchissements d’argent.



mardi 8 novembre 2016

L’acquisition de la propriété immobilière par les étrangers :La Souveraineté en danger?

Par une simple circulaire, le conservateur de la propriété foncière a, peut-être, exonéré nos voisins libyens de l’autorisation du gouverneur. Il dit qu’il se soumet à des jugements du tribunal administratif conformément au droit international.
Il explique encore que cette circulaire ne concerne pas les terres agricoles.
Il est clair que le domaine d’application de cette circulaire concerne le domaine immobilier (les immeubles bâtis).
Seule une ONG tunisienne vient d’annoncer qu’elle intente une action en référé devant le Tribunal Administratif pour annuler cette circulaire.
Rappelons certains faits :
Après le 14 janvier 2011, les ventes immobilières ont atteint des prix colossaux et certaines zones du Grand Tunis ont émergé du lot, spécialement la région des berges du lac ou les régions du Manarat, Manazah et Nasr.
Les acheteurs étaient spécialement des Tunisiens et nos voisins de l’est (surtout Libyens).
Ces opérations ont suscité de sérieuses questions quant aux sources de ces fonds et quant à la nature de ces mêmes opérations.
De 2011 à 2016, ces opérations n’ont pas cessé. Mais tout le monde observe que le rythme a soudainement baissé voir même s’arrêté durant ces derniers mois.
Un constat :
Durant toute cette période, aucune intervention législative ou règlementaire pour annuler l’autorisation du gouverneur n’a eu lieu.
Un rappel du fondement de cette autorisation du gouverneur :
Cette autorisation date depuis la fin des années cinquante et visait surtout à veiller à ce que l’Etat Tunisien veille à contrôler la propriété des immeubles par les étrangers, surtout quand ces immeubles se situent dans des zones stratégiques ou sensibles sur le territoire tunisien.
Elle vise aussi à contrôler la proportion de la propriété immobilière des étrangers quant aux immeubles Tunisiens. N’oublions pas que l’histoire arabe a eu une très malheureuse expérience dans ce domaine.
Revenons à l’actualité :
1)    Le conservateur de la propriété foncière n’est pas une autorité indépendante. il reste soumis à l’autorité hiérarchique qui est le ministère des finances.
2)    Pour quelle raison on fait évoquer, aujourd’hui, et après plus de 50 ans, le droit international ?
3)    Les motifs du recours fait par l’ONG tunisienne contre la circulaire du conservateur fait évoquer, in fine, l’ordre public économique et sécuritaire tunisien. L’a-t-on pris en considération ?
4)    Le conservateur a-t-il agi seul ou sur ordre hiérarchique ?
5)    Si on tient aux déclarations que plusieurs demandes d’enregistrement de telles ventes sont en suspend auprès des recettes des finances :
a)    Quel montant entrera pour le trésor de l’Etat sachant que le taux est de 6% du montant déclaré (un montant toujours déclaré en baisse pour moins payer le fisc) ?
b)    A-t-on fait une étude comparative entre ce montant et le montant qui pourra revenir au trésor si on procède à la vérification si les vendeurs et acheteurs ont honnêtement déclaré leurs revenus au fisc ?
c)     A-t-on vérifié si ces opérations de vente/achat n’impliquent aucune opération de blanchissement d’argent ?
d)    Sommes-nous assurés de notre sécurité par cette acquisition massive de la propriété immobilière nationale par une population étrangère ?
Enfin, la Tunisie est un petit pays. Le code des investissements nouvellement adopté autorise les étrangers à acquérir des terres agricoles. Avec cette mesure, le bâti et l’agricole commencent à échapper au contrôle de l’Etat.

WARNING



jeudi 3 novembre 2016

Projet de Loi de finances 2017 : le magnifique exercice démocratique

Ce projet de loi, dit-on, est le pire post-révolution…
Ce projet de loi, dit-on encore, pourrait faire sauter l’actuel gouvernement…
Ce projet de loi a été critiqué de partout, attaqué de partout…
Politiciens, parlementaires, experts économiques, financiers, défenseurs des intérêts de différentes corporations de métiers et de consommateurs envahissaient depuis quelques jours les plateaux radios, télévisions et les pages des journaux.
Le simple tunisien, sans connaissances fiscales et financières, commence à s’intéresser à ce projet de loi et y porter un jugement intuitif allant d’une opinion hostile à une opinion ralliée à une autre corporative sans aucune raison mathématique justificative.
Pour un projet de loi qualifié du plus pire, il est le seul projet de loi de finances qui suscite un intérêt populaire qu’aucun autre projet de loi n’en a eu durant toute l’histoire de la Tunisie.
Selon mon modeste point de vue, ce projet de loi est magnifique.
Il est magnifique car il illustre parfaitement la merveilleuse éternelle mutation politique du pays.
Rien n’est acquis.
Tout est en mouvement…
Laissant à côté ses mesures et ses dispositions…quels aspects nous offre ce projet de loi ?
De très belles futures manœuvres politico-parlementaires en vue.
Voyons de près :
Il est supposé un gouvernement d’union national jouissant d’une très solide majorité parlementaire.
De par les déclarations des uns et des autres, parlementaires et politiques, ce projet de loi, dans sa forme actuelle, risque de ne pas être adopté.
Théoriquement, ce gouvernement est sur un siège éjectable. Théoriquement aussi, ce gouvernement est composé de membres qui sont les plus doués en manœuvres politico-parlementaires. Pratiquement, le dénouement ne se fera pas sur les plateaux audiovisuels.
Encore plus important et plus intéressant, cette bataille latente entre Gouvernement, parlement et, en second degré, la présidence quant à l’exercice du pouvoir constitutionnel.
Le parlement, l’ARP en l’occurrence, veut exercer ses pleins pouvoirs accordés par l’article 66 de la Constitution :
 Il vote le budget. Et quand il vote, il doit être souverain.
L’exécutif, tire profit aussi de cette constitution et tente de manœuvrer  via 2 dispositions : le 2ème paragraphe de l’article 62 et l’article 63 lui accordant, d’une part, l’exclusivité de proposer la loi de finances, et d’autre part, limitant le champ de manœuvre du parlement quant au pouvoir d’amendement.
Encore plus merveilleux, c’est cette manœuvre des partis et organisations ayant suscrits à une initiative présidentielle visant à gérer l’initiative politique, et peut être à la monopoliser, de faire comprendre à l’auteur et à ses conseillers, que la vraie bataille ne se joue plus à Carthage mais plutôt à Bardo.
La démocratie ne se limite pas à des dispositions constitutionnelles, mais elle sera déterminée surtout par des pratiques et des manœuvres.
Le grand dilemme que certains veulent nous imposer: ou viser l’enracinement d’une démocratie éternelle et subir des conséquences économiques néfastes, ou sacrifier la démocratie et accepter des solutions économiques pouvant altérer nos droits et libertés.

C’est un faux problème. Je regarde autour de moi et le constat est sans appel : les meilleurs économies sont celles des pays les plus démocratiques.