jeudi 3 novembre 2016

Projet de Loi de finances 2017 : le magnifique exercice démocratique

Ce projet de loi, dit-on, est le pire post-révolution…
Ce projet de loi, dit-on encore, pourrait faire sauter l’actuel gouvernement…
Ce projet de loi a été critiqué de partout, attaqué de partout…
Politiciens, parlementaires, experts économiques, financiers, défenseurs des intérêts de différentes corporations de métiers et de consommateurs envahissaient depuis quelques jours les plateaux radios, télévisions et les pages des journaux.
Le simple tunisien, sans connaissances fiscales et financières, commence à s’intéresser à ce projet de loi et y porter un jugement intuitif allant d’une opinion hostile à une opinion ralliée à une autre corporative sans aucune raison mathématique justificative.
Pour un projet de loi qualifié du plus pire, il est le seul projet de loi de finances qui suscite un intérêt populaire qu’aucun autre projet de loi n’en a eu durant toute l’histoire de la Tunisie.
Selon mon modeste point de vue, ce projet de loi est magnifique.
Il est magnifique car il illustre parfaitement la merveilleuse éternelle mutation politique du pays.
Rien n’est acquis.
Tout est en mouvement…
Laissant à côté ses mesures et ses dispositions…quels aspects nous offre ce projet de loi ?
De très belles futures manœuvres politico-parlementaires en vue.
Voyons de près :
Il est supposé un gouvernement d’union national jouissant d’une très solide majorité parlementaire.
De par les déclarations des uns et des autres, parlementaires et politiques, ce projet de loi, dans sa forme actuelle, risque de ne pas être adopté.
Théoriquement, ce gouvernement est sur un siège éjectable. Théoriquement aussi, ce gouvernement est composé de membres qui sont les plus doués en manœuvres politico-parlementaires. Pratiquement, le dénouement ne se fera pas sur les plateaux audiovisuels.
Encore plus important et plus intéressant, cette bataille latente entre Gouvernement, parlement et, en second degré, la présidence quant à l’exercice du pouvoir constitutionnel.
Le parlement, l’ARP en l’occurrence, veut exercer ses pleins pouvoirs accordés par l’article 66 de la Constitution :
 Il vote le budget. Et quand il vote, il doit être souverain.
L’exécutif, tire profit aussi de cette constitution et tente de manœuvrer  via 2 dispositions : le 2ème paragraphe de l’article 62 et l’article 63 lui accordant, d’une part, l’exclusivité de proposer la loi de finances, et d’autre part, limitant le champ de manœuvre du parlement quant au pouvoir d’amendement.
Encore plus merveilleux, c’est cette manœuvre des partis et organisations ayant suscrits à une initiative présidentielle visant à gérer l’initiative politique, et peut être à la monopoliser, de faire comprendre à l’auteur et à ses conseillers, que la vraie bataille ne se joue plus à Carthage mais plutôt à Bardo.
La démocratie ne se limite pas à des dispositions constitutionnelles, mais elle sera déterminée surtout par des pratiques et des manœuvres.
Le grand dilemme que certains veulent nous imposer: ou viser l’enracinement d’une démocratie éternelle et subir des conséquences économiques néfastes, ou sacrifier la démocratie et accepter des solutions économiques pouvant altérer nos droits et libertés.

C’est un faux problème. Je regarde autour de moi et le constat est sans appel : les meilleurs économies sont celles des pays les plus démocratiques. 

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