vendredi 15 novembre 2019

Les mauvais signes avant-coureur du mandat 2019-2024


Le 13 novembre 2019, s’est tenue la séance inaugurale du nouveau parlement pour le mandat législatif 2019-2024. Une séance tenue in extremis puisqu’elle devait se tenir dans un délai de 15 jours à partir de la date de l’annonce, par l’ISIE, des résultats définitifs des élections législatives, qui était vendredi 8 novembre 2019.
Cette Assemblée devait relever le défi : voter la loi de finances 2020 le 10 Décembre 2019, au plus tard.
Précipiter la tenue de la séance inaugurale n’était pas fondé sur une volonté de relever le défi cité, mais pour des raisons de calculs et manœuvres politiques étant donné que le 15 novembre était aussi une date butoir pour présenter au Président de la République le nom du Candidat au poste du Chef du Gouvernement.
On s’attendait à ce que cette Assemblée allait bosser 24/24 pour constituer ses groupes, répartir les sièges entre eux, mettre en place ses structures (Bureau, Commissions, etc) et entamer l’examen du budget 2020.
Eh ben Non.
Ils prennent le plaisir de consacrer 2 journées pour élire le Président et ses 2 vice-Présidents pour ensuite prendre un congé. De combien de jours ? de 4 jours.
Et ils annoncent une plénière pour le 18 Novembre ! pour quoi faire ?: Pour voir s’il faut mettre en place une commission provisoire (temporaire) pour se charger de l’étude du budget 2020. Oui.

4 jours de gâchis.
Durant ces 4 jours on aurait pu former les groupes, répartir les sièges des différentes structures et mettre en place le Bureau, la haute instance pour gérer l’Assemblée.
Qui décide aujourd’hui de la gestion de l’Assemblée ?
Je vous laisse deviner.
Encore, cette commission provisoire, de combien de membres va être constituée ? comment va-t-on la constituer ?
Le paramètre fondamental dans la constitution des différentes structures de l’ARP sont les groupes et leur représentativité.
Or, on a fait de la sorte que ces groupes ne se forment pas.
Si on va se limiter aux listes, la composition de ladite commission va impliquer plusieurs conséquences :
-       La Présidence de la commission ne va pas être attribuée nécessairement à l’opposition ce qui est une violation de la Constitution.
-       On va priver 35 élus d’être représentés au sein de cette commission. On va les priver de 4 sièges (qui seront attribués aux partis majoritaires).
Cette démarche est en violation manifeste des dispositions du règlement intérieur.
Dans un autre cadre qui reste lié aux « pratiques » parlementaires en rapport avec la désignation du candidat au poste du Chef du Gouvernement, la lettre signée aujourd’hui par le Président de la République en rapport avec cette action, laisse entendre, quant à sa forme, que les « bonnes pratiques » qu’on a tenté de les mettre en place depuis 2012, sont en voie de disparaître.

La police et la forme de la date n’ont pas manqué à laisser plusieurs tunisiens choqués ou intrigués par ces changements.
Un Etat démocratique met en place ses « rituels » protocolaires pour marquer ses empreintes. Mais quand une personne change ces rituels pour placer ses empreintes, on a bien droit de craindre pour l’Etat.

mercredi 13 novembre 2019

Une séance inaugurale du mandat législatif 2019-2024 : La Nahdha gagne toujours en manœuvre.



Pourquoi parler de « gagner » ?
Tout simplement par référence à tout ce qui a été dit et analysé dans les « médias » et reportés dans les « réseaux sociaux »
Elle a pu faire élire son leader « Rached Ghannouchi » Président de cette Assemblée (ARP), dès le 1er tour, alors que plusieurs médias et plusieurs internautes pensaient à une situation d’impasse.
Pourquoi la Nahdha gagne toujours ?
Elle a gagné en 2011, en 2014 et en 2019.
Elle a gagné et gagnera pour 2 raisons :
D’abord, elle a pu et su comprendre ses adversaires. Ses adversaires n’ont jamais essayé de le faire. Et même s’ils ont tenté de le faire (Tayyar et Chaäb), ils ont failli au « finish » des manœuvres.
Ensuite, la Nahdha a inventé la technique de profiter des médias, secteur qui lui est « hostile » en majorité, en le mêlant à ses « intox » pour faire passer de faux messages à ses adversaires.
Pour exemple, l’intensité des passages des représentants du Tayar et Chaäb dans les médias est telle qu’on dirait que la Nahdha est devenue « prisonnière » de ces 2 partis.
La nahdha a joué le jeu et a fait semblant, dans le cadre des médias. Mais dans les coulisses, elle manœuvré autrement et discrètement.
Médias, tayar et Chaäb se sont leurrés.
Enfin, la Nahdha a pu acquérir ce don de savoir qui a « soif » du « pouvoir » et qui est « amateur » en politique. Elle a fait, fait et fera toujours alliance avec la 1ère catégorie.
Bien entendu, La Nahdha continuera à gagner tant que ses adversaires vont refuser une telle analyse. Ils vont la considérer (et ils l’ont toujours fait) comme une analyse « favorable » ce qui est inacceptable pour eux.
Ce qui doit être mis en relief, c’est que plusieurs citoyens « normaux », croyant fermement à leurs élites, se trouvent souvent et de plus en plus déçus. Et ils sont sur le point d’abandonner. C’est pour ces gens que j’écris aujourd’hui.

lundi 11 novembre 2019

Séance Inaugurale : Séance de manœuvres à multiples risques.


En plus des difficultés techniques de la séance inaugurale expliquées dans un post précédent, cette séance est une illustration des manœuvres politiques qui ne visent pas l’ARP mais elles s’en servent.
Une Séance « in extremis » !!
Après l’annonce par l’ISIE des résultats définitifs des élections législatives le 8 novembre, l’ARP n’a pas attendu les 15 jours impartis pour tenir sa 1ère séance du mandat législatif 2019-2024 et a annoncé la date du 13 novembre (6 jours après) pour tenir une telle séance.
Y a le feu ? pourquoi une telle célérité ?
Si Mohamed Naceur avait repris ses fonctions à la tête de l’ARP, cette date aurait été différente (aux alentours de 18-19 novembre).
Je crains que cette date a été choisie par le parti Nahdha aidée par le 1er Vice-président (Appartenant au même parti).
Et ce choix de date risque de ne pas être « innocent ».
En effet, le samedi 16 est la date limite pour le parti Nahdha de présenter son candidat au poste du Chef du Gouvernement.
Comment cette séance est en rapport direct avec le poste du Chef du Gouvernement ?
Une séance inaugurale pour servir le choix du Chef du Gouvernement
Pour une fois, le Parti Nahdha a trouvé en face de lui deux partis politiques qui savent manœuvrer autant que lui : Tayyar et Chaäb (le peuple).
Depuis décembre 2011, date des élections de l’ANC et durant le mandat ARP (2014-2019), la Nahdha était le seul parti politique qui savait manœuvrer et il avait la voie libre pour imposer ses choix. Même le front populaire n’avait pas pu (ou n’avait pas su) stopper ses manœuvres.
Le Parti Nahdha, sous pression de ses adhérents, voulait former un gouvernement avec des partis et listes à tendance « révolutionnaire », en l’occurrence : tayyar démocratique, le partie Chaäb, Al karama (coalition de la dignité) et quelques partis et listes à faible représentativité et ce pour viser d’atteindre 133 députés (si Tahia Tounes leur rejoint).
Le parti a exclu de ses comptes le parti Qalb Tounes (Cœur de Tunisie, 38 élus) et Le Parti destourien libre (17 élus).
Analysant la situation, Tayyar et Chaäb ont profité de l’occasion pour tenter d’imposer leurs conditions : Le Chef du Gouvernement ne doit pas être du parti Nahdha, des ministères bien déterminés ne doivent pas, non plus, être gérés par des ministres de la Nahdha et tant d’autres conditions.
Pour une fois, la Nahdha trouve en face deux négociateurs coriaces et qui connaissent sa « technique ».
Pour y faire face, la Nahdha accélère ses manœuvres en imposant une date de la séance inaugurale, d’une part, et en réunissant son conseil de la Choura courant samedi et dimanche derniers.
Ce conseil de la Choura n’a pas attendu la fin de ses travaux pour annoncer dès le soir de samedi qu’il tient à son « droit constitutionnel » de proposer le Chef du Gouvernement mais aussi qu’il propose son leader, Rached Ghannouchi, au poste du Président de l’ARP (parlement).
Le Tayyar n’a pas trop attendu pour annoncer à son tour qu’il présente un candidat au poste du Président de l’ARP.
Quel scénario pour la séance inaugurale ?
Si on reste à ce stade des déclarations, le choix du Président de l’ARP va se limiter logiquement entre le Candidat Nahdha et celui du Tayyar.
Si le Candidat Nahdha n’obtiendra pas au 1er tour les 109 voix nécessaires, il risque de perdre le second tour car il ne pourra compter que sur Al Karama et quelques listes à une seule voix (même si Tahia Tounes vote pour lui, il ne passera pas les 95 voix).
C’est pour cette raison, on verra 3 scénarios possibles :
-       Hypothèse1, Un des candidats est élu au 1er tour : les choses sont claires. Un accord sur le gouvernement (Chef et membres) est trouvé la veille.
-       Hypothèse 2, Aucun candidat n’est élu. Soit la séance sera suspendue (pour une raison ou une autre) pour « négocier ». Soit on passe au second tour immédiatement après l’annonce des résultats.
-       Hypothèse 3, le vote du second tour laissera apparaître une solution ou une crise. Si l’élection du Président se fera par un vote massif (y compris celui du parti d’un candidat ou l’autre), il est évident qu’un accord a été trouvé. Si l’élection se fait par une différence minime des voix, c’est que l’accord n’a pas été trouvé et que la formation du gouvernement risque bel et bien de s’éterniser.
Le parlementarisme dénaturé
 Peu importe les scénarios de cette séance inaugurale, on notera encore une fois que l’expérience parlementaire tunisienne sera dénaturée et « infectée » par un empiétement exagéré du cadre partisan rendant ce « parlementarisme » tunisien pathologique et défiguré.
Toutes les négociations en cours actuellement sont faites sans la participation active des élus qui vont siéger au sein de cette Assemblée durant 5 ans.
Durant tout le mandat de l’ANC (Assemblée Nationale Constituante) et de l’ARP, la décision parlementaire s’est presque faite en dehors de l’enceinte parlementaire et en dehors de la volonté des élus.
Il est très fort probable qu’on verra une ARP 2019-2024 ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre.
Il est très fort probable aussi qu’on assistera à une crise politique très aiguë mettant en péril toute la transition démocratique et menaçant même l’expérience démocratique tunisienne.
8 ans d’échec ont fait subir au peuple toutes les souffrances. Ce peuple ne pourra plus accepter cette souffrance au bout de 10 ans.
Ce peuple soit il fera une seconde révolution, soit il acceptera avec « plaisir » une nouvelle dictature (et c’est l’hypothèse la plus éventuelle).

mardi 5 novembre 2019

Le Futur Parlement : Un démarrage des travaux APEURANT.


Quand cette ARP devrait se réunir ?
Dans un délai maximum ne dépassant pas 15 jours de la déclaration définitive de l’ISIE des résultats des élections législatives. (Art 6 R.I)
A priori, L’ISIE va annoncer les résultats le Jeudi 7 Novembre 2019. Elle doit ensuite envoyer cette liste (avec noms et adresses) à l’ARP dont son administration se chargera par la suite d’envoyer les convocations (date d’envoi possible entre le 11 et le 13) pour une plénière probablement le Mardi 19 novembre (C’est l’actuel Bureau qui doit se réunir et fixer la date).
Qui convoque la nouvelle ARP ?
C’est le Président Sortant : Mohamed Naceur
La 1ère séance : Un Ordre de Jour très lourd et inutile
La 1ère casse-tête pour l’administration parlementaire, c’est déterminer le mode de placement des députes dans l'hémicycle.
A priori, les élus seront placés groupés par partis et listes et on aura une configuration à partir de la droite (par rapport au Président de la séance) vers la gauche comme suivant :
Nahdha ; Qalb Tounes ; Tayyar; Karama ; Doustouri Horr ; Chaab ; Tahia Tounes ; Machrou3 ; Rahma ; Nida ; Badil ; Afek ; Amal & 3amal ; Ensuite les partis et listes à 1 siège :FP, UDS, SD,Imtyez, Al Khir, LV, Retour aux origines, Jeunesse du futur, Citoyenneté et développement, wafa bel3ahd, badhl é 3ata, Bkolna twensa, Mahabba, Siliana dans nos yeux, voix des agriculteurs, 3ich tounsi et Nahnou houna.
Mettre les élus du « Doustouri Horr » entre Karama et Chaab, c’est risquer la tension. Idem pour les élus Rahma à placer logiquement entre Machrou3 et Nida.
Et ce n’est pas fini.
L’administration devra aussi se décider sur le mode de vote le plus approprié : électronique ou à main levée !
C’est fini ? non, car ce n’est pas encore commencé.
D’abord, Ouverture par un discours du Président Sortant après le récit de la Fatiha.
Ensuite, il appelle le plus âgé des membres ainsi que les 2 les plus jeunes pour « présider la séance ».
La séance sera levée le temps de faire tout un protocole inutile.
La séance reprendra avec le serment que prêteront le Président de la séance et ses 2 assistants.
Ensuite, Président de la séance ainsi que ses 2 assistants, vont réciter la liste de tous les membres de la nouvelle Assemblée, telle que transmise par l’ISIE (Prénom, prénom du père et nom).
Après, c’est au tour de tous les membres de prêter le serment.
Après serment, une commission composée de 7 membres chargée du contrôle du vote et de recensement des voix est constituée conformément à la règle de représentativité proportionnelle des partis et coalitions.
Si on applique l’art 9 à la lettre, cette commission sera composée comme suivant : Nahdha (2 membres) et Qalb Tounes, Tayyar, Karama, Doustouri horr et Tahia Tounes (1 membre chacun).
Comble de la donne : cette commission restera valable pour tout le mandat législatif 2020-2024 !!!
Enfin, Le président de la séance ouvrira les candidatures aux postes du Président de l’ARP, du 1er vice-président et du second vice-Président.
Un 1er vote est fait pour élire le Président. Il lui faut 109 voix.
Sinon, on passe au second tour pour choisir entre les 2 premiers au 1er tour.
S’il y aura égalité des voix, le plus âgé sera élu, sinon on fera un tirage au sort (aucune procédure n’est prévue pour cette hypothèse !! Qui fera ce tirage ? par quel moyen ou procédé ?).
Ensuite, on passe aux élections du 1er vice-Président et du 2ème vice-Président
Bien entendu, chaque élection est indépendante de l’autre.
Une fois le Président, ses 2 vice-présidents élus, la plénière est suspendue.
Reprise de la plénière : ça peut partir dans tous les sens.
D’abord, que va faire cette plénière après reprises ?
L’art 15 du R.I dispose qu’elle poursuivra l’examen de son ordre du jour fixé ultérieurement.
Fixé par qui ?
Par l’ancien Bureau de l’ARP.
En 2014, on a très vite changé cet OJ pour parer à plusieurs problèmes.
Logiquement, cet ordre du jour doit prévoir toute la procédure nécessaire pour que cette Assemblée soit fonctionnelle et efficace dans les plus brefs délais.
N’oublions pas que nous sommes déjà le 19 Novembre et que cette ARP doit voter le budget au plus tard le 10 décembre. Donc, il leur restera 21 jours.
Durant 21 jours, Cette ARP devra voir groupes parlementaires constitués, bureau mis en place, 9 commissions fonctionnelles et un budget discuté et voté.
Première urgence donc, c’est la mise en place des groupes. Pour former un groupe il faut au moins 7 membres.
Une fois les groupes constitués, on passera à la formation du Bureau et les commissions.
La formation des groupes nécessitera au moins 24h. idem pour mettre en place le bureau et dresser la composition des commissions.
C’est Infernal.
Si on se limite à cartographie électorale, le bureau sera composé comme suivant : Nahdha (3sièges), QT, Tayyar, Karama, Doustouri, Chaab et TT (1 siège). Machrou3 et Rahma disputeront 1 siège.
Sans compter bien entendu les 3 sièges réservés au Président et ses 2 vice-Présidents.
Enorme !
Supposons que les Groupes ont été constitués, que le Bureau a été mis en place et s’est réuni pour fixer la quote-part des groupes aux commission, les problèmes sont résolus ?
Ils ne font que s’aggraver.
Ça va même du pire en pire.
Pourquoi ?
Simple : la grande bataille sera la Présidence de la commission des finances qui va de droit à l’Opposition.
Quelle Opposition ?
Plusieurs partis ont fait des déclarations qu’ils sont d’ores et déjà dans l’opposition.
Faux.
C’est du Populisme.
Le Règlement intérieur de l’ARP a fixé les conditions pour être qualifié ou classé dans l’Opposition.
En effet, l’art 46 dispose que l’opposition est :
Tout groupe ne faisant pas partie du gouvernement et n’ayant pas accordé dans sa majorité des membres la confiance au gouvernement ou la confiance dans sa continuité.
- Les élus non appartenant à des groupes n’ayant pas voté pour la confiance au gouvernement.
En plus du vote négatif, il faut se déclarer aussi « Opposition ».
Donc, pour parler d’opposition, il faut un vote de confiance au Gouvernement.
Plusieurs scénarios sont possibles :
Le 1er, c’est que le vote pour un nouveau gouvernement s’effectuera entre le 19 et le 22 Novembre pour avoir d’une part un gouvernement et d’autre part une opposition.
Problème : Ce gouvernement défendra un budget qui n’est pas le sien. Les aléas sont majeurs.
Le 2ème c’est de ne pas voir un vote de confiance avant le 10 décembre permettant à l’actuel gouvernement de défendre un budget qui ne l’intéresse plus mais aussi de voir une Assemblée « anarchique » puisqu’on comprendra jamais qui est dans l’opposition et qui est ailleurs.
Bien entendu, le budget sera discuté par une commission des finances sans Président.
Le 3ème, et c’est le plus probable et le très moins bon : Cette Assemblée risque de tenter la violation du Règlement intérieur et on reviendra au cercle vicieux de la navigation dans le non droit et les tensions extrêmes.