Le droit Tunisien a reconnu pour la 1ère
fois de son histoire la notion de l’opposition parlementaire en tant que
composante essentielle de l’Assemblée des Représentants du peuple (ARP) au sein
de l’article 60 de la nouvelle Constitution.
Cette article 60 a été l’œuvre de la
commission des Consensus, conçu et approuvé durant la dernière phase de l’adoption
de la Constitution (mois de Janvier 2014), sous pression de l’opposition au
sein de l’ANC.
Durant cette période, chacune des
parties se projetait dans la future configuration de l’ARP es qualité. L’opposition
s’y voyait opposition, la majorité s’y voyait majorité.
Les élections du 26/10/2014 ont donné
une nouvelle configuration. La projection du janvier de 2014 se trouvait
altérée de manière substantielle.
Effectivement, lors de la rédaction
du Règlement Intérieur, la commission s’est trouvée en face d’un épineux
problème : que faut-il entendre par Opposition ? Comment l’identifier ?
L’ARP a hérité d’une épineuse problématique
laissée sans réponse par l’ANC.
Au lieu de résoudre la question, la
commission a transmis le problème à la plénière pour lui trouver la solution
appropriée.
Encore par malchance, la question s’est
posée à la veille du vote de confiance que devrait accorder l’ARP au nouveau
Gouvernement.
L’enjeu de la l’identification de l’Opposition
est purement structurel : à cette opposition, revient de facto, la
présidence de la commission chargée des finances et le poste du rapporteur de
la commission chargée des affaires étrangères.
Entre-temps, la commission du R.I a
retenu comme critère d’octroi de la présidence des postes aux bureaux
des commissions, le facteur « Groupe » (article 70).
Après discussion et débat entre
présidents des groupes, l’opposition, en tant qu’entité, a été identifiée dans
l’article 46 du R.I , par référence à la notion du « groupe » et « élu »
se déclarant « opposant » et ne faisant pas partie de la coalition
gouvernementale.
La conception de l’article 46
postérieurement à l’article 70 laissait un doute quant à l’étendue de son
application. Fallait-il appliquer ce dernier article à tous les cas de figure
ou l’exclure du champ d’application de l’article 46 du R.I en relation avec l’article
60 de la Constitution.
Pour les uns, il faut d’abord,
respecter le texte Constitutionnel qui parle d’Opposition dans le sens absolu. Ce
texte n’ayant pas fait de distinction entre élus opposants et groupes
opposants, il n’y pas lieu à distinction. L’opposition doit être prise dans son
sens unique peu importe le cadre de son organisation (groupe ou individuel). Cette
interprétation met l’article 70 en marge de la Constitution.
Pour les autres, la référence à l’article
70 implique nécessairement la négation de l’opposition individuelle et la
rétention exclusive de l’opposition « groupe ».
Deux lectures, deux interprétations…
Après un intense débat, la question
est restée sans réponse et le bureau a été appelé à trancher par un vote :
fallait-il accorder les fonctions au groupe d’opposition majoritaire ou à la
majorité d’opposition ?
Le Bureau a tranché pour la 2ème
lecture par un vote majoritaire sans appel.
Ce vote n’a pas plu à un groupe et sa
réaction a altéré le déroulement normal des séances de l’ARP.
Il est évident que l'ambiguïté du
texte constitutionnel et la réticence de la commission du R.I devant l’obligation
de trancher la question, ont mis le bureau de l’ARP devant un choix très
difficile.
Le résultat du vote laisse entendre
que le bureau est presque cohérent dans son choix, mais il ne reste pas moins,
que ce problème soulève, une autre fois, les lacunes du nouveau R.I mais aussi celles du texte constitutionnel.
Concevoir un texte n’est pas un
exercice facile ; encore plus difficile, c’est concevoir ses éventuelles
problématiques. Aujourd’hui, heureusement, nous sommes en état de diagnostiquer
les défaillances et nous avons le temps d’y remédier.
Plutôt que polémiquer, fallait-il
militer pour un texte sans ambigüité.
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