Le 26 Janvier 2018 j’avais écrit à propos du Bilan
législatif et Constitutionnel 2012-2017 impliquant l’ANC (Assemblée
Nationale Constituante) et ARP (Assemblée des Représentants du Peuple) et j’avais
conclu que ce bilan n’était pas satisfaisant (pour ne pas dire désastreux)
compte tenu d’un Etat post révolutionnaire constitué autour d’une nouvelle
Constitution appelé à réaliser, dans un environnement démocratique inédit, les
aspirations du peuple Tunisien.
Pas besoin de dresser le bilan de l’ARP durant les quatre premières
années de sa législature.
Il suffit de mettre les 7 chapitres de la Constitution devant soi et
tenter de savoir ce qui a été réalisé et mis en œuvre de tout ce dispositif
constitutionnel, dispositif devant impliquer théoriquement, au moins, de rendre
ce pays un paradis d’Eden.
Hélas, le Pays ressemble plus à un Enfer que sa jeunesse et ses
compétences le fuient avec un esprit « sauve qui peut ». C’est dramatique
et tristement ressenti.
L’ARP est-elle responsable de cet échec ?
Tout dépend de l’analyse qu’on fasse de cette ARP : l’institution
ou ses composantes.
L’institution, et contrairement aux jugements et évaluation des uns et
des autres, a réussi et même mieux que l’ANC. Cette réussite est appréciée par
rapport à un angle de vue très étroit à savoir le « jeu »
démocratique constaté durant ses travaux que ce soit au niveau de ses commissions
ou au niveau de ses plénières.
Durant 4 ans, cette ARP nous a offert pleines de manœuvres procédurales,
politiques et constitutionnelles inédites en histoire politique tunisienne ou
en droit parlementaire Tunisien présentant une meilleure manifestation de l’exercice
démocratique de la vie politique en Tunisie.
C’est ingrat de nier à cette ARP tout mérite pour la consécration d’une
jeune démocratie en pleine recherche d’efficacité sachant que la scène
médiatique est devenue de plus en plus orientée, canalisée et même exclusive ou
interdite à certaines orientations partisanes ou idéales.
C’est effectivement cette efficacité que l’ARP n’a pas réussi à atteindre
et à réaliser. La cause est certainement inhérente à des facteurs internes et
externes.
Un échec voulu et planifié ?
L’échec de cette ARP est un échec planifié et voulu. C’est mon opinion
personnelle et j’en suis de plus en plus convaincu.
Facteurs internes
Premiers responsables de cet échec, les composantes internes de cette
ARP.
Premier responsable de l’échec de l’ARP, le parti gagnant des
élections de 2014 : Nida Tounes.
Ce parti a dupé non seulement ses électeurs, mais surtout ses élus car
il n’avait aucune vision de gouverner. Pour preuve, les élus du groupe
parlementaire Nida Tounes se sont trouvés durant presque 4 ans livrés à eux
même dépourvus de toute assistance. Conséquence : ils ont été manipulés à
tort et à travers et le groupe parlementaire n’a jamais réalisé une manœuvre politique
digne de citation.
Deuxième responsable, peut-être, est le parti Nahdha et son
groupe parlementaire. N’ayant pas « mis les bouchées doubles » les
élus Nahdha ont laissé Nida Tounes se diriger droit au mur. Il ne faut les en
vouloir car ils ne sont pas tenus de concourir au succès d’un parti rival qui s’est
tant flatté de les avoir battu et vaincu.
La Nahdha n’a jamais pardonné le fait d’être exclue du pouvoir un 9
janvier 2014 qu’elle considérait légitimement mandatée par les élections 2011.
Troisième responsable sont les élus eux même, toutes tendances
confondues. Une grande majorité des élus ARP se sont comportés comme
représentants de leurs partis, secteurs, régions et même tribaux plutôt que
représentants du peuple, et ce en violation manifeste de la Constitution.
Preuve à l’appui, inquiétante et manifeste : il suffit de visionner
les interventions en fonction de l’art 118 du Règlement intérieur et faire le
scan de la liste pour vérifier s’ils ont intervenus sur la base d’intérêts nationaux !
Facteurs externes
Le premier responsable est inéluctablement le Président de la
République et son équipe du palais (depuis Janvier 2015) qui se sont comportés à
la mode « Zaba » refusant la nouvelle donnée constitutionnelle les
cantonnant à un rôle secondaire.
En intervenant dans le processus de formation du gouvernement, le
Président de la République et son équipe (qui a tenté à maintes reprises de
contrôler le groupe parlementaire) ont ébranlé l’ARP et semé le trouble dans le
processus constitutionnel et parlementaire du fonctionnement de l’Etat.
Profitant de ces « troubles » et « faiblesses »,
les lobbies « sectoriels » et même « mafieux », deuxième
responsable, se sont permis de s’introduire dans la vie
parlementaire via élus, sociétés civiles, médias et « experts »
accrédités pour imposer des choix socio-économiques pesant lourdement sur l’image
de l’ARP.
Bien entendu, les médias, troisième responsable, n’ont
pas manqué à un trouble jeu de mettre la pression pour toujours induire l’ARP
en erreur et la pointer de doigt comme étant le pire des maux.
Finalement, l’ARP s’est trouvée au premier rang du banc des accusés.
Pourrait-elle s’en sortir ?
L’ARP et la meute 2019
En 2019, l’ARP ne fera pas mieux qu’en 2018.
Les facteurs sont toujours internes et externes.
Internes d’abord, la pathologie sera toujours la même :
une cartographie politique très hétérogène et extrêmement disparate.
Premier signe alarmant, l’essoufflement de la « coalition nationale »
avant même annonce de son passage au cadre partisan. La majorité pro
gouvernementale reste fragile et fébrile. Mauvais signe pour cette ARP.
Deuxième signe, la majorité prend de l’ampleur avec comme preuve ce
recours pour non constitutionnalité de la loi des finances 2019 signé par un
nombre record des élus avoisinant les 80 élus.
Troisième signe très intéressant, l’attitude du parti Nahdha. Il veille
à ce qu’aucune force significative alternative ne prenne forme. Autant les
forces politiques restent disparates et faibles, autant que sa main mise sur le
parlement soit assurément garantie.
La Nahdha vise sérieusement à gouverner, et seule, dès 2019. Si elle a
bien étudié sa « vision », elle pourra y demeurer pour des décennies.
Externes ensuite, et ce sont des facteurs plus dangereux,
les assoiffés du pouvoir qui émergent de partout et de nulle part.
Aucun « expert » en sciences politiques (nous n’en avons pas)
ne s’est attardé sur le comportement du Tunisien en matière électorale (après 2
élections 2011 et 2014).
Le tunisien est-il raisonnable et rationnel devant les urnes ?
Non.
La preuve : Al Aridha en 2011 et Nida en 2014.
Par effet des médias, les Tunisiens (dans leur majorité) pointent la
classe politique actuelle de doigt et lui font assumer la pleine responsabilité
et sont tentés de modifier le suffrage par un choix inédit et inattendu. Seule la
Nahdha en sortira indemne par effet d’allégeance de sa masse électorale.
Autre donné inquiétante : le Tunisien ne fait plus confiance aux
médias tunisiens. Par susceptibilité, le Tunisien pourra facilement
sanctionner, et sévèrement, les plus médiatisés.
Conséquence apeurante : des inconnus du peuple pourront se trouver
au sommet de la scène et on ne sait jamais ce qu’ils veulent faire ou en sont
capables d’accomplir.
Un fait certain : une machine occulte est en train de travailler pour
créer la surprise en 2019.
Un fait inquiétant : toutes les structures de l’Etat sont en train
de commettre des conneries pour pousser le tunisien à choisir éventuellement un
scrutin pour cette « machine ».
Conclusion : Faut faire moins de conneries possibles en 2019 pour
en avoir mois de cons en 2020.
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