Certains ont qualifié ce qui s’est
passé aujourd’hui à la plénière de l’ARP de Honteux.
Mais je ne suis pas du même
avis. C’est attendu. Heureusement qu’on n’a pas vu pire.
I-
Le Contexte
Cette plénière a été programmée
à la veille d’une grève générale décrétée par la centrale syndicale UGTT et
touchant le secteur public et la fonction publique suite à l’échec des
négociations avec le Gouvernement.
Elle vient aussi 2 jours après
la date du 14 janvier, fête de la révolution Tunisienne.
Elle vient aussi suite à une
plénière « ratée » du 15 janvier 2019.
II-
Plénière et Ordre du Jour
Une plénière ça se planifie et
avant qu’elle soit fixée, plusieurs paramètres doivent être pris en
considération. Ces paramètres sont d’ordre intrinsèque et extrinsèque.
C’est après que tout ceci est
considéré que son ordre du jour est arrêté. Et c’est la tâche la plus délicate
à accomplir.
Pour une plénière imprévisible
il faut un ordre du jour symétrique comportant dans chacun de ses points inscrits
des angles de sortie.
Ça été toujours un point faible
de cette ARP et le restera. Cette plénière a été mal planifiée autant que son
ordre du jour, médiocre soit-il, ne comportait aucune porte de sortie.
III-
Signes avant-coureurs
Une plénière tenue le 15
janvier, soit au lendemain de la fête de la révolution, ne comportant aucun
point relié à cet évènement, est une défaillance manifeste de prévoyance.
Et pourtant, un élu l’avait
mentionné : Ammar Amroussia
Si on a manqué de prévoyance le
15, récidiver le 16, la veille d’une grève générale, ne peut être que fatale. Et
c’est ce qui est passé
IV-
Points d’ordre et ordre
du jour
La plénière a commencé avec son
rythme habituel : le retard, une présence pas réjouissante et un ordre du
jour très formel sans « issues de sorties ».
L’article 110 du règlement
intérieur (R.I) précise que la plénière est ouverte par l’annonce de son ordre
du jour.
Et ce n’est pas pour rien.
Un ordre du jour n’est pas
seulement un texte, mais surtout et essentiellement un « timing »
qui va orienter la plénière sur son point de départ et son point d’arrivé, que
ce soit en matière de débat ou en matière d’horaire.
Donc, il fallait annoncer l’ordre
du jour et attendre le feedback de la plénière pour le soumettre au vote.
Et quand un ordre du jour est
très bien étudié, il ne faut pas attendre la plénière à réagir, mais faut la
devancer en demandant si un groupe voulait proposer un ajout de point.
Toute proposition est alors
soumise au vote. Le vote mettra fin à toute contestation.
Encore plus, cette technique
facilitera l’application de l’article 117 du R.I régissant l’invocation des
points d’ordre.
Ça n’a pas été fait.
Les points d’ordre soulevés vont
fusiller la plénière et la sauter.
D’ailleurs, on va assister à des
multitudes de « points d’ordre » bizarroïdes.
V-
Point d’ordre presque
parfait :
Dès l’ouverture de la plénière,
Ahmed Seddik, Président du groupe Front Populaire (de gauche) a soulevé un
point d’ordre en rapport avec le projet de loi en cours de discussion.
Il a évoqué durant son
intervention plusieurs irrégularités procédurales et certaines confusions
touchant les concepts (quorum, voix / réunions conjointes de structures…
etc)
VI-
Points d’ordre imprécis
Après, s’en est suivi 2 autres
interventions : une de Salem Labiedh et l’autre de Samia Abbou. Ces 2 élus
ont évoqué la question de la grève générale du secteur public mais ils ont
exprimé une demande un peu imprécise : la convocation du gouvernement et l’UGTT,
par le Président de l’ARP.
Ils auraient dû proposer un
amendement de l’Ordre du jour pour ajouter une audition au gouvernement et à l’UGTT
ou soumettre à la plénière une proposition de tenir une séance de discussion
avec ces 2 parties. Ils ne l’ont pas fait. Ce n’était pas un point d’ordre.
VII-
Point d’ordre hors sujet
Dans l’euphorie, un élu du
groupe Nahdha, Lakhdhar belhouichette, a évoqué un point d’ordre hors sujet :
Le Président tentant de lui
souligner l’illégalité de son intervention, n’a pas tenu bon à lui retirer la
parole car elle n’avait aucun rapport ni avec le projet de loi en cours de discussion
ni avec le contexte du débat. 2 autres interventions ont suivi le même sens.
C’est l’hémorragie, ou le début.
VIII- Point
d’ordre honteux
Bien entendu, quand on part dans
le mauvais sens, on ne peut que s’attendre au pire. Le pire n’a pas tardé.
Tebbini a parlé
Même si le Président de l’ARP a
fait usage du retrait de la parole à cet élu, il l’a fait tard et n’a pas été
avisé que la plénière est en train de prendre une autre tournure.
En donnant la parole au
Président du premier groupe parlementaire, Mr Bhiri, il a ouvert la voie au
dérapage.
IX-
Le point d’ordre de
responsabilité
Après avoir donné la parole au
président du 1er groupe parlementaire (par le nombre d’élus), le
Président a continué à s’écarter de la liste d’intervenants qu’il a lui-même annoncé
en donnant la parole au président du groupe alliance nationale, Mr Mustapha Ben
Ahmed, groupe lié au chef du gouvernement.
Ce président, a fait rappeler au
Président les dispositions du R.I, et in fine, lui a fait imputer la
responsabilité de la confusion qui commence à régner.
X-
Le Président réagit
Le Président de la séance ne
pouvait pas ignorer la tension au sein de la plénière. Ses conseillers, non
plus. La meilleure solution était de suspendre la plénière et de convoquer
Bureau et Présidents des groupes à une réunion d’urgence.
Ça n’a pas été fait. L’ordre du
jour ne prévoyait nullement des issues de sortie en cas « d’incendie ».
Au lieu de remettre les clés de
la solution à la plénière et atténuer la tension par le vote, il annonce une
solution qui va encore énerver les esprits
Et en face de la contestation,
il s’énerve
Alors que tous les signes
indiquent que la plénière dérape, aucun conseil n’est venu pour « lever la
plénière ».
Le chaos n’est plus à éviter
XI-
Le chaos s’installe
Devant une telle anarchie de
gestion de plénière, l’élu Jilani Hemmami, du groupe Front National, n’a pas
trouvé mieux de contester la décision du Président de la plénière que de
protester devant même le pupitre de la Présidence, chose invitant des agents de
la garde présidentielle, chargée de la protection du Président de l’ARP, à s’interposer :
Une première dans l’histoire parlementaire Tunisienne à voir un agent armé
accéder à l’Hémicycle.
XII-
Les images chocs
Bien entendu, les choses ne sont
plus contrôlables. Et la tension a monté de plusieurs crans.
Nous ne sommes pas arrivés à des
scènes où des élus se tabassent en pleine plénière mais on était à un point.
Mais il faut quand même
remarquer un truc. Un élu qui ne respecte pas son président du groupe, on le
mettant par terre.
Conclusion :
Quand on programme une plénière, il faut savoir programmer et
bien ficeler son ordre du Jour.
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