mercredi 16 janvier 2019

De l’ordre, au chaos passant par le désordre.


Certains ont qualifié ce qui s’est passé aujourd’hui à la plénière de l’ARP de Honteux.
Mais je ne suis pas du même avis. C’est attendu. Heureusement qu’on n’a pas vu pire.
I-                      Le Contexte
Cette plénière a été programmée à la veille d’une grève générale décrétée par la centrale syndicale UGTT et touchant le secteur public et la fonction publique suite à l’échec des négociations avec le Gouvernement.
Elle vient aussi 2 jours après la date du 14 janvier, fête de la révolution Tunisienne.
Elle vient aussi suite à une plénière « ratée » du 15 janvier 2019.
II-                  Plénière et Ordre du Jour
Une plénière ça se planifie et avant qu’elle soit fixée, plusieurs paramètres doivent être pris en considération. Ces paramètres sont d’ordre intrinsèque et extrinsèque.
C’est après que tout ceci est considéré que son ordre du jour est arrêté. Et c’est la tâche la plus délicate à accomplir.
Pour une plénière imprévisible il faut un ordre du jour symétrique comportant dans chacun de ses points inscrits des angles de sortie.
Ça été toujours un point faible de cette ARP et le restera. Cette plénière a été mal planifiée autant que son ordre du jour, médiocre soit-il, ne comportait aucune porte de sortie.
III-              Signes avant-coureurs
Une plénière tenue le 15 janvier, soit au lendemain de la fête de la révolution, ne comportant aucun point relié à cet évènement, est une défaillance manifeste de prévoyance.
Et pourtant, un élu l’avait mentionné : Ammar Amroussia

Si on a manqué de prévoyance le 15, récidiver le 16, la veille d’une grève générale, ne peut être que fatale. Et c’est ce qui est passé
IV-             Points d’ordre et ordre du jour
La plénière a commencé avec son rythme habituel : le retard, une présence pas réjouissante et un ordre du jour très formel sans « issues de sorties ».
L’article 110 du règlement intérieur (R.I) précise que la plénière est ouverte par l’annonce de son ordre du jour.
Et ce n’est pas pour rien.
Un ordre du jour n’est pas seulement un texte, mais surtout et essentiellement un « timing » qui va orienter la plénière sur son point de départ et son point d’arrivé, que ce soit en matière de débat ou en matière d’horaire.
Donc, il fallait annoncer l’ordre du jour et attendre le feedback de la plénière pour le soumettre au vote.
Et quand un ordre du jour est très bien étudié, il ne faut pas attendre la plénière à réagir, mais faut la devancer en demandant si un groupe voulait proposer un ajout de point.
Toute proposition est alors soumise au vote. Le vote mettra fin à toute contestation.
Encore plus, cette technique facilitera l’application de l’article 117 du R.I régissant l’invocation des points d’ordre.
Ça n’a pas été fait.
Les points d’ordre soulevés vont fusiller la plénière et la sauter.
D’ailleurs, on va assister à des multitudes de « points d’ordre » bizarroïdes.
V-                 Point d’ordre presque parfait :
Dès l’ouverture de la plénière, Ahmed Seddik, Président du groupe Front Populaire (de gauche) a soulevé un point d’ordre en rapport avec le projet de loi en cours de discussion.
Il a évoqué durant son intervention plusieurs irrégularités procédurales et certaines confusions touchant les concepts (quorum, voix / réunions conjointes de structures… etc)

VI-             Points d’ordre imprécis
Après, s’en est suivi 2 autres interventions : une de Salem Labiedh et l’autre de Samia Abbou. Ces 2 élus ont évoqué la question de la grève générale du secteur public mais ils ont exprimé une demande un peu imprécise : la convocation du gouvernement et l’UGTT, par le Président de l’ARP.
Ils auraient dû proposer un amendement de l’Ordre du jour pour ajouter une audition au gouvernement et à l’UGTT ou soumettre à la plénière une proposition de tenir une séance de discussion avec ces 2 parties. Ils ne l’ont pas fait. Ce n’était pas un point d’ordre.
VII-         Point d’ordre hors sujet
Dans l’euphorie, un élu du groupe Nahdha, Lakhdhar belhouichette, a évoqué un point d’ordre hors sujet :

Le Président tentant de lui souligner l’illégalité de son intervention, n’a pas tenu bon à lui retirer la parole car elle n’avait aucun rapport ni avec le projet de loi en cours de discussion ni avec le contexte du débat. 2 autres interventions ont suivi le même sens.
C’est l’hémorragie, ou le début.
VIII-     Point d’ordre honteux
Bien entendu, quand on part dans le mauvais sens, on ne peut que s’attendre au pire. Le pire n’a pas tardé.
Tebbini a parlé

Même si le Président de l’ARP a fait usage du retrait de la parole à cet élu, il l’a fait tard et n’a pas été avisé que la plénière est en train de prendre une autre tournure.
En donnant la parole au Président du premier groupe parlementaire, Mr Bhiri, il a ouvert la voie au dérapage.

IX-             Le point d’ordre de responsabilité
Après avoir donné la parole au président du 1er groupe parlementaire (par le nombre d’élus), le Président a continué à s’écarter de la liste d’intervenants qu’il a lui-même annoncé en donnant la parole au président du groupe alliance nationale, Mr Mustapha Ben Ahmed, groupe lié au chef du gouvernement.
Ce président, a fait rappeler au Président les dispositions du R.I, et in fine, lui a fait imputer la responsabilité de la confusion qui commence à régner.

X-                 Le Président réagit
Le Président de la séance ne pouvait pas ignorer la tension au sein de la plénière. Ses conseillers, non plus. La meilleure solution était de suspendre la plénière et de convoquer Bureau et Présidents des groupes à une réunion d’urgence.
Ça n’a pas été fait. L’ordre du jour ne prévoyait nullement des issues de sortie en cas « d’incendie ».
Au lieu de remettre les clés de la solution à la plénière et atténuer la tension par le vote, il annonce une solution qui va encore énerver les esprits

Et en face de la contestation, il s’énerve

Alors que tous les signes indiquent que la plénière dérape, aucun conseil n’est venu pour « lever la plénière ».
Le chaos n’est plus à éviter
XI-             Le chaos s’installe
Devant une telle anarchie de gestion de plénière, l’élu Jilani Hemmami, du groupe Front National, n’a pas trouvé mieux de contester la décision du Président de la plénière que de protester devant même le pupitre de la Présidence, chose invitant des agents de la garde présidentielle, chargée de la protection du Président de l’ARP, à s’interposer : Une première dans l’histoire parlementaire Tunisienne à voir un agent armé accéder à l’Hémicycle.


XII-         Les images chocs
Bien entendu, les choses ne sont plus contrôlables. Et la tension a monté de plusieurs crans.
Nous ne sommes pas arrivés à des scènes où des élus se tabassent en pleine plénière mais on était à un point.
Mais il faut quand même remarquer un truc. Un élu qui ne respecte pas son président du groupe, on le mettant par terre.


Conclusion :
Quand on programme une plénière, il faut savoir programmer et bien ficeler son ordre du Jour.

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