La campagne pour
les échéances électorales 2019 a commencé très tôt tambour battant. Une bonne
majorité des tunisiens sont inquiets d’où le risque de voir un taux de
participation très faible.
Mais les plus
avertis sont hautement inquiets de l’absence des conditions démocratiques
minimales pour un scrutin juste, transparent et sans équivoque en comparaison
avec les élections 2011, 2014 et 2018.
Ces inquiétudes
deviennent sérieuses et légitimes à partir du moment où on constate une nette
volonté de démunir les instances chargées du déroulement démocratique des
élections (première partie) et d’orienter le choix des électeurs vers un « menu »
restreint par le biais de certains centres de sondages d’opinion travaillant
dans l’illégalité et l’opacité (deuxième partie).
Des instances démunies ou inexistantes!
Le processus
pour mettre les instances chargées de garantir des élections libres,
transparentes et justes « hors état de nuire » ou « hors service »
a commencé depuis la proclamation des résultats des élections 2014.
D’abord, ça été
l’ISIE dont le processus est passé de sa décapitation (par la démission forcée
de son Président Chafik Sarsar, professeur universitaire), à la révocation
déguisée de ses meilleurs membres (Dont Najla Braham, juge administratif) pour
aboutir à la mise en place finale d’un collège incompétent, dépourvu de charisme
et de fermeté, et très ouvert aux partis politiques (Son Président actuel est
une parfaite illustration).
L’ISIE étant
devenue une instance « soumise » et « Madhmouna », il ne
restait plus qu’à attaquer l’autre instance « incontrôlable » qui est
la HAICA.
Depuis une
quinzaine de jours, plusieurs charlatans (politiques et juristes) commencent à
faire circuler une mise en doute sur la légalité de cette instance s’arguant de
la fin de son mandat !
Qu’en est-il
réellement ?
Le décret-loi
116 du 2/11/2011 a créé la HAICA en précisant dans son article 7§3 que le
président, vice-président et les membres sont nommés pour un mandat
Non renouvelable
de 6 ans. Un renouvellement du tiers du collège est prévu chaque 2 ans
exception faite pour le Président et son vice-président (article 48 du même
décret-loi).
Il fallait attendre
le 3 Mai 2013 (presque 2 ans après le décret-loi 116) pour voir la mise en
place de la HAICA.
2 éléments à
retenir :
D’abord, le décret-loi 116 a déterminé le mandat des
membres sans avoir précisé le mandat de la HAICA.
Ensuite, ce même décret-loi n’a pas prévu le cas de
dépassement du mandat de 6 ans par un ou plusieurs membres.
Entre temps,
Une Assemblée Nationale Constituante (ANC) a été élue (élections novembre 2011)
pour doter la Tunisie d’une nouvelle Constitution.
Cette ANC a
adopté le 26 janvier 2014 (2 ans après le décret-loi 2011 et 1 année presque
après la mise en place effective de la HAICA) une nouvelle Constitution en
prenant en compte bien entendu les dispositions juridiques en vigueur dont ce
décret-loi et elle a traité la HAICA par 2 mesures :
D’abord, faire hisser la HAICA d’une instance
publique indépendante à une Instance Constitutionnelle Indépendante (Art 127).
Ensuite, maintenir la HAICA dans ses fonctions jusqu’à
élection de la nouvelle ICA.
Le Constituant
savait de la durée du mandat des membres de la HAICA et il a peut-être estimé
que la nouvelle Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), élue en novembre
2014, serait en mesure d’élire la Nouvelle ICA avant fin mandat législatif.
Mais il n’a pas fixé une échéance pour le faire.
Et même s’il l’aurait
fait ! quelles conséquences en tirer ?
L’exemple
frappant est celui de l’IPCCPL (Instance Provisoire du Contrôle de la
Constitutionnalité des Projets de Lois).
Le dernier
paragraphe du point 7 de l’article 148 de la Constitution 2014 précise que
cette IPCCPL prend fin par la mise en place de la Cour Constitutionnelle.
Le point 5 du
même article 148 précise que la Cour Constitutionnelle doit être mise en place
dans un délai d’une année des élections législatives (Novembre 2015).
Logiquement,
décembre 2015 l’IPCCPL n’a aucune raison d’être puisque la Cour
Constitutionnelle est supposée mise en place.
Et pourtant,
jusqu’à nos jours cette Cour n’est pas mise en place et cette IPCCPL continue
à fonctionner malgré les délais constitutionnels.
Et personne n’a
soulevé ce point juridique !!
La raison est simple : le contrôle de la
constitutionnalité des lois est primordial pour la démocratie tunisienne et l’instance
doit continuer à statuer.
C’est encore
plus évident pour la HAICA qui a tant demandé au gouvernement de procéder au
renouvellement du son tiers sans réponse car les « autorités »
concernées par ce renouvellement ont expressément refusé de présenter des
candidats.
En outre, l’ARP
n’a pas vu urgent ni nécessaire de procéder à l’adoption d’une nouvelle loi
régissant l’audiovisuel.
Est-il logique
de mettre à néant une disposition Constitutionnelle (art 148.7§2) au motif d’un
dépassement de mandat non sanctionné par la loi ??
En réalité, le
processus d’entamer les élections 2019 sans instance de régulation de l’audiovisuel
était bien programmé et planifié depuis que la HAICA a annoncé qu’elle prendra
en charge la réglementation des mesures d’audience, secteur contrôlé par des
lobbies occultes et tentaculaires (politiques, médias, finances et autres..).
Bien entendu, ce processus n’est pas à
dissocier de la volonté de la non mise en place de la Cour Constitutionnelle,
de l’Instance Constitutionnelle de la lutte contre la corruption et le retard
dans l’adoption de la loi relative au Tribunal financier.
Sondages d’opinion : la volonté de forcer le vote des tunisiens.
Le sondages d’opinion
est un secteur presque monopolisé par 2 « centres » : SIGMA
Conseil et EMRHOD Consulting. Un secteur occulte, opaque et travaillant sans
cadre juridique imposant des normes internationales reconnues et sans
équivoque.
Le lobby de ce
secteur est tellement courtisé par les politiciens et les gens des médias a pu
mettre en échec l’adoption d’une proposition de loi déposée par le groupe
parlementaire « Al Machrou3 » (Le Projet).
Par ailleurs,
certaines personnes averties affirment que les 2 « centres » ont
conclu une « entente » pour coordonner leurs « résultats »,
Chose à ne pas exclure quand on constate que certaines entreprises travaillant
dans le secteur se sont retirés du marché.
Profitant de l’absence du cadre légal imposant la
transparence de leurs financements, la « logique » de leurs méthodes
et l’origine des commandes de leurs sondages, ces acteurs tentent aujourd’hui d’imposer
au tunisien un vote fatal.
Plus inquiétant,
l’information qui circule depuis 2014 concernant les rapports de ces acteurs
avec des « intérêts étrangers ».
La technique de
ces « acteurs » est connue : imposer un questionnaire limité et
restreint pour orienter le sondage.
La méthode est
connue aussi : le téléphone. Par ce moyen, les centres d’appel font un
appel et peu importe que la personne appelée réponde ou non, un formulaire de
réponse est dressé et supposé contenir de réelles réponses alors que ce sont
des formulaires préétablis sans aucune possibilité de vérifier l’authenticité
des donnés.
Et le comble :
ces liens louches entre ces acteurs et responsables des médias (Al Hiwar,
Nessma) sans la moindre réaction du législateur.
Au vu du bilan dressé, ces élections 2019 ne seront pas
de libres élections.
Par évidence, la démocratie Tunisienne est un réel danger
d’être confisquée par les lobbies mafieux de tout bord avec complicité des
autorités publiques.
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