La campagne électorale pour les élections 2019 (Législative en
Octobre et Présidentielle en novembre) bat déjà son plein. Elle commence très
tôt comme en 2011.
Ces élections nous inquiètent car elles pèseront lourdement sur le
processus démocratique en Tunisie. Risque que plusieurs n’y prêtent pas assez d’attention.
La Tunisie a connu plusieurs élections après la Révolution 2011,
mais chacune avait sa spécificité et elle aura encore des élections en 2019 et
elles seront différentes.
Faisons un petit Rappel historique.
Elections 2011 : Un
Etat en mode navigation à vue.
Les élections 2011 ont abouti à la mise en place d’une ANC (Assemblée
Nationale Constituante) composée d’environ une trentaine d’entités politiques
(Partis et listes indépendantes) mais très vite structurées autour de 6 groupes
parlementaires dont 3 formaient la majorité qui soutenait le gouvernement (Nahdha,
CPR et Takattol avec 134 députés).
Nonobstant l’adoption de la Constitution le 26 janvier 2014, L’Etat
Tunisien a navigué à vue jusqu’aux élections 2014 et les pathologies sont
multiples dont notamment :
1-
Une
cartographie politique parlementaire très instable (dissolution de plusieurs
groupes parlementaires) sans que cela affecte la majorité initiale à garder
environ 114 voix (au lieu de 134).
2-
Deux
gouvernements successifs ayant subi les effets néfastes de 2 assassins
politiques (Belaïd et Brahmi) et n’ayant pas réellement un vrai programme pour
gouverner.
3-
Une gestion
chaotique des entreprises de l’Etat avec des nominations hasardeuses.
4-
Une
gestion locale et régionale très médiocre et très maladroite.
Bien entendu, on peut faire toute une liste de ce qui n’a pas
marché et s’étaler longtemps sur les causes.
Elections 2014 : Un
Etat en mode auto destruction.
Les élections 2014 ont permis au Parti Nida Tounes de gagner et les
élections législatives (avec 86 sièges) et les élections Présidentielles (Avec
Béji Caïd Essebssi, BCE).
Ce Parti promettait au Peuple de déloger la Nahdha du pouvoir, de
gouverner avec des compétences hors pair (« on a de quoi former 4
gouvernement »), de restaurer l’Etat et assurer la prospérité.
Rien n’a été fait. Pire, c’est tout le contraire promis qui a été
réalisé : Coalition avec la Nahdha, des gouvernements formés d’incompétents,
un Etat disloqué et une pauvreté et une crise économique que la Tunisie n’a
jamais connu.
Plus étonnant et irrationnel, Nida Tounes se disloque, perd son leadership
au parlement, dépose son 1er chef du gouvernement et voit le second
chef du gouvernement qu’il a proposé se retourner contre lui et forme son
propre parti politique.
Jamais l’Etat Tunisie n’a été aussi ridicule, faible et anarchique
que sous le règne de cette majorité « bâtarde » entre des partis de
tout bord : Nida, Nahdha, ULP, Afek, Machrou3, Moubadra, etc…
De ce constat (presque unanime) ont émergé des appels à des
révisions soit du régime politique mis en place par la Constitution (plus de
pouvoirs au Président de la République) soit du régime électorale (mise en
place d’un seuil pour faire émerger une majorité parlementaire uniforme).
En réalité, ce sont des appels dilatoires pour occulter les défaillances
manifestes et incontestables de certains partis politiques.
Elections 2019 : la
volonté de confisquer le vote libre des Tunisiens et la négation du régime
démocratique
Depuis fin 2017, des forces occultes et d’autres groupes de
pression (Certains médias et certains centres de sondage d’opinion) se sont
unis pour imposer aux Tunisiens un choix calculé aux Tunisiens pour les
élections 2019.
Malheureusement, certains partis politiques présents au parlement,
s’y sont associés (par ignorance ou en connaissance de cause) ignorant les
conséquences éventuellement gravissimes sur le processus de transition démocratique
en Tunisie.
Décortiquant ce qui se passe now :
La Nahdha mène le jeu
Le parti Nahdha, vainqueur des élections 2011 et évincé du pouvoir
avant les élections 2014, n’a jamais pardonné cette « injustice » qu’on
lui a infligé. Il a su négocié et imposer sa présence au gouvernement, en tant
que second parti, avec le vainqueur Nida Tounes.
Depuis les élections 2014, ce parti a géré ses coalitions et ses
prises de positions en vue d’un seul objectif : disloquer ses rivaux. Et il
a réussi à le faire.
Encore intéressant, le parti Nahdha réussit sur deux autres plans : Communication, où il épargne ses « leaders »
de faire des apparitions objets de « relais » à polémique. Stratégie
parlementaire en imposant « in fine » ses choix.
Mais le top, c’est que ce parti réussi l’impensable : peser
même sur ses rivaux et en déterminer leur existence (voir les déclarations sur
les rapports avec la Présidence de la République et sur les éventuels appuis
aux candidatures aux élections présidentielles).
Nida Tounes et ses
démembrements : l’illusion utopique
Vainqueur des élections 2014, Nida Tounes s’est disloqué en
plusieurs partis (aujourd’hui en conflits entre eux) et son groupe
parlementaire n’est que le 3ème groupe.
Les partis qui s’en ont issus n’arrivent pas à émerger. Ils s’entretuent
au lieu de s’unir. Ils se dispersent au lieu de s’unifier.
Le Front Populaire : l’occasion
ratée
Le front Populaire (Jabha) est une belle surprise des élections
2014. Composite de 9 partis de gauche et de nationalistes, il a hissé 15
parlementaires au sein de l’ARP ayant formé un groupe resté homogène et
imposant.
Mais la Jabha a raté une réelle occasion de fusiller les données en
refusant l’initiative (il faut avouer qu’elle était un peu « impolie »)
du Parti des patriotes démocratiques unifié (WATAD) de procéder à des préliminaires
pour choisir le candidat aux présidentielles 2019.
C’était un peu dogmatique et voir même psychologiquement
pathologique de croire encore à la chance d’un « symbole » qui n’a
aucune chance de mobiliser une jeunesse sympathisante de la gauche.
Bref, la Jabha sert sans le savoir les
intérêts de ses adversaires.
Conclusions
On part sur un mauvais pied.
Les électeurs doivent patienter et ne pas
paniquer. Le choix électoral ne se fait pas dans la précipitation et la position
politique ne se concrétise jamais par le refus de scrutin : VOTEZ.
Le
Seuil électoral : Une vraie menace sur notre démocratie
Si on se place actuellement sur des données
infaillibles, un seuil de 3% donnera au parti Nahdha une majorité avoisinant
les 3/5 du parlement. Un seuil de 5% lui pourra fournir une majorité de plus de
2/3. C’est énorme et très dangereux.
Encore plus dangereux, si les tunisiens
pourront voter un parti « inédit » (comme Al Aridha), qui pourrait se
manifester par la suite comme un parti très radicaliste et extrémiste sombrant
le pays dans le chaos et l’anarchie.
Méfiez-vous
des sondages d’opinion
C’est la peste du pays. Ils bossent sans
scrupules et sans méthodes et normes scientifiques connues. Ils essayent d’imposer
aux électeurs des choix précis et orientés. Leur jeu est très dangereux et ils
doivent être pénalement tenus responsables de tous les maux qu’ils causent au
pays.
En fin de compte, ils tentent de nous
imposer un choix radical entre Tayar et Abir Moussi. Et devant un tel choix, l’option
du Tunisien peut aboutir à un résultat pas moins désolant, le suivant.
Le pire
résultat de 2019 : une cartographie politique plus dispersée qu’en 2011
Le pire résultat qui pourra en résulter des
élections 2019 est de voir une cartographie politique parlementaire plus
dispersée et plus disparate que celle de 2011.
Ainsi, le pire scénario possible est de
voir le parti nahdha gagner les élections sans avoir la majorité absolue (109)
et de voir des dizaines d’entités politiques divergentes et opposées avoir
entre 1 et 5 sièges laissant la majorité parlementaire fluctuante, instable et
mouvante de manière à laisser le pays encore dans l’instabilité.
Enfin :
Les élections se gagnent sur un programme
Ignorez Facebook et Twitter. Ne regardez
pas les photos et vidéos. Ne jamais s’attarder sur des photos et images soignés
avec des filtres.
Exigez des écrits bien détaillés sur des
programmes, des objectifs à atteindre et des moyens prévus pour y arriver.
Documentez-vous sur les candidats proposés,
leurs historiques et leures compétences.
Et surtout, pour ceux et celles qui ont
gouverné depuis janvier 2011, faites-leur passer ce message : « ne n’avons
pas à se faire des illusions : vous avez échoué ».
Tentons le Changement. Forçons-le.
Résistez.
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