vendredi 15 novembre 2013

L’officier de police judiciaire de la toile est crée :ATT

Lisant une première fois le décret n° 2013-4506 du 6 novembre 2013, relatif à la création de l'agence technique des télécommunications (ATT), je sentais qu’un « truc » m’a échappé tout au long de ses articles.

Après plusieurs lectures et tout en se référant et fouillant dans les dispositions de plusieurs textes connectés (code des télécommunications, loi sur la sécurité informatique, code pénal, code de procédure pénale, le décret fixant les conditions générales d'exploitation des réseaux publics des télécommunications et des réseaux d'accès, le décret-loi n° 2011-115 relatif à la liberté de la presse, de l'imprimerie et de l'édition, …) ; après avoir constaté que le dit décret fait référence au texte de l’OPPP et, SURTOUT, à la loi organique n° 2004-63 du 27 juillet 2004, portant sur la protection des données à caractère personnel ; et après avoir mis tous ces textes sur le même tapis, ma conclusion n’a pas tardé : ce texte pourrait être dangereux.

Ce texte, de part sa teneur, aurait dû être transmis à l’ANC et adoptée sous forme de loi étant donné que ses dispositions ne sont pas assez claires et risquent de véhiculer des risques d’atteinte à la vie privé des citoyens.

Que va faire cette ATT ?

Etablissement public à caractère administratif et placé sous la tutelle du ministère chargé des technologies de l'information et de la communication, cette Agence assure l'appui technique aux investigations judiciaires dans les crimes des systèmes d'information et de la communication.

Cet appui technique est décrit par le texte par la réception et le traitement des ordres d'investigation et de constatation des crimes susvisé , la coordination avec les différents opérateurs de réseaux publics et opérateurs de réseaux d'accès et tous les fournisseurs de services dans tout ce qui ce relève de ses missions et l'exploitation des systèmes nationaux de contrôle du trafic des télécommunications dans le cadre du respect des traités internationales relatifs aux droits de l'Homme et des cadres législatifs relatifs à la protection des données personnelles. 
Le Travail de l’ATT n’est plus un appui technique, mais cette ATT devient un vrai officier de police judiciaire de l’internet.

Ce qui laisse craindre c’est cette notion que je n’ai pas pu lui trouver une définition précise : crimes des systèmes d'information et de la communication.
Le texte du décret ne fait référence à aucun texte pour mieux cerner ces crimes.

D’ailleurs, les textes tels que le code des télécommunications, la loi sur la sécurité informatique, le code pénal, ne prévoient pas de tels crimes !!

Si ce sont des violations techniques liées à l’exploitation des réseaux, des agences telles que l’ATI ou l’ANSI (Agence nationale de sécurité informatique) pouvaient être chargées de ces tâches.

Et ces agences n’ont pas besoin d’un ordre judiciaire pour agir contre toute action d’atteinte à nos réseaux.

Mais la création d’une nouvelle agence avec référence au décret-loi relatif à la liberté de la presse et la loi organique sur la protection des données à caractère personnel laissent entendre que cette ATT va procéder à un autre travail d’investigation impliquant un accès à nos outils informatiques à notre insu. C’est de l’intrusion légale.

Entre les lignes, on sent que cette création de l’ATT est une réaction à la réticence de l’ATI de pratiquer la censure sur certains sites web et poursuivre certains internautes accusés de différents crimes et violations. L’ATI avait expliqué son « impuissance » par une impossibilité technique.

Il est vrai que la toile est considérée par certains comme un espace de non droit. Tout y est permis.

Certes que partout dans le monde, une législation a été adoptée et des agences ont été crées pour lutter contre la criminalité sur internet.

Tout le monde est d’accord sur l’obligation de lutter contre ce flux de violations des droits non sanctionnées et restées impunies.

Mais cette lutte ne doit nullement méconnaitre les droits fondamentaux des citoyens et en premier de ces droits : le droit à l’intimité.

Etre épié à son insu, même sur un ordre judiciaire (imprécis et de source non identifiée) dont on n’a pas la certitude qu’on en soit informé à son propos, est une atteinte grave et dangereuse aux droits élémentaires de la personne humaine.

Ces actions de l’ATT doivent être assorties de certaines garanties.

Ma conviction : ce décret est en violation avec les dispositions de l’OPPP. Ce texte aurait été transmis à l’ANC pour être adopté sous forme de loi. Car si cette procédure aurait été respectée, les élus auraient débattus et éclairés les termes du texte et prévu le minimum des garanties pour les citoyens.

Les moyens d’action de l’ANC sont encore là : une audition du ministre en charge pourrait éclairer le sens des dispositions du dit décret. Une proposition de loi serait encore mieux.

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